Que veut la dame de la mer ?
Sylviane Agacinski, François Flahault, Françoise Decant, Jean-Pierre Sarrazac
Le 12 mars 2012 au Théâtre des Bouffes du Nord
Video du débat animé par Marie Vandenbussche
Chef opérateur Jacques Besse / Prise de son François Olivier / Montage Jean-Marie Lengellé
Sylviane Agacinski
François Flahault
Françoise Decant
Jean-Pierre Sarrazac
A PROPOS DES INTERVENANTS
Marie Vandenbussche-Cont, doctorante
Doctorante à l’Université Paris 3, Marie Vandenbussche travaille, sous la direction de Joseph Danan, à un état des lieux des théories du réel sur la scène théâtrale française contemporaine.
Elle a été attachée d’enseignement et de recherche à Montpellier 3 et Poitiers, et chargée de cours à Paris Ouest. Elle est membre du groupe de recherche de Paris 3 sur la poétique du drame moderne et contemporain.
Sylviane Agacinski, philosophe
Philosophe, Sylviane Agacinski a enseigné au Lycée Carnot, à Paris, avant de devenir Directeur de Programme au Collège international de Philosophie (1986 -1991), puis professeur agrégée à l’Ecole des hautes études en sciences sociales jusqu’en 2010.
Le passeur de temps, modernité et nostalgie, Seuil, 2000.
Politique des sexes (Points Seuil, 2009) a été traduit dans une quinzaine de langues.
Engagements, Seuil, 2005.
Métaphysique des sexes, Masculin/Féminin aux sources du christianisme, Points Seuil, 2007.
Drame des sexes, Ibsen, Strindberg, Bergman (Seuil, 2008) étudie les formes théâtrales du conflit conjugal.
Corps en miettes (Flammarion, 2009) décrit la réification et la marchandisation du corps humain qui, à travers les techniques de procréation, sont particulièrement aliénantes pour les femmes.
A paraître en avril 2012 : Femmes entre sexe et genre, au Seuil.
François Flahault, philosophe
Directeur de recherche émérite au Centre national de la recherche scientifique et membre du conseil de rédaction de la revue L’Homme.
Après une formation philosophique, il s’est engagé dans des recherches en sciences humaines. Il a notamment travaillé sur les contes populaires européens (La Pensée des contes, 2002), ainsi que sur les contes d’Andersen. Il a enseigné au Département de Psychanalyse de Paris VIII, à l’UFR de Sciences Cliniques de Paris VII et au Collège International de philosophie. Il anime actuellement le séminaire « Anthropologie générale et philosophie » à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS).
Jugeant excessive la confiance de la philosophie dans sa valeur universelle, il s’efforce d’exhumer les partis pris qui ont donné son caractère spécifique à la pensée occidentale. Il s’appuie également sur les connaissances scientifiques qui, aujourd’hui, renouvellent notre conception de l’homme et de la société en nous invitant à explorer le fait que l’être humain existe dans et par des écosystèmes relationnels.
Françoise Decant, psychanalyste
Psychanalyste à Paris.
Membre de La fondation Européenne pour la psychanalyse.
A publié plusieurs articles dans différentes revues de psychanalyse (Che Vuoi ?, Figures de la psychanalyse, La Clinique Lacanienne) sur Ibsen, Kafka, Schnitzler, entre autres.
A publié en 2007, chez Eres (Arcanes), un livre intitulé L’Ecriture chez Henrik Ibsen : un savant nouage. Son hypothèse est que l’écriture, constituée comme symptôme, à entendre comme «ce que les gens ont de plus réel», pourrait bien avoir eu pour Ibsen cette fonction, de le maintenir en vie, et de lui éviter le suicide.
Jean-Pierre Sarrazac, dramaturge
Auteur dramatique et professeur émérite de dramaturgie aux Universités de Paris 3-Sorbonne nouvelle et de Louvain-la-Neuve. A l’Université Paris 3, il a dirigé L’Institut d’Etudes théâtrales ainsi que l’Institut de recherches en Etudes théâtrales (IRET) et, au sein de l’IRET, le Groupe de recherches sur le drame moderne et contemporain (co-direction : Jean-Pierre Ryngaert). Il a obtenu pour l’ensemble de son œuvre le Prix Thalie 2008 décerné par l’Association internationale des critiques de théâtre (AICT).
Théâtres intimes, Actes Sud, 1989
Jeux de rêve et autres détours, Belval, Circé, « Penser le théâtre », 2004
Je vais au théâtre voir le monde, Paris, Gallimard jeunesse, 2008
A paraître au Seuil, coll. Poétique, en novembre 2012 : Poétique du drame moderne- 1880-2010
Dernières pièces :
Théâtre 1, L’Enfant-roi, Le Mariage des morts, Les Inséparables, La Passion du jardinier, Belval, Circé, 2007.
Ajax/retour(s) et La Boule d’or, inédites.
AU SUJET DES INTERVENTIONS
Sylviane Agacinski
Brand allait jusqu’au bout de sa logique, jusqu’à sa chute. Ellida cède aux lois d’une vie plus sage – comme si Ibsen faisait reculer son personnage devant la puissance de l’attrait érotique où il risque de s’abîmer. »
« L’Appel de la mer : Elida », dans Drame des sexes, Ibsen, Strindberg, Bergman (Seuil, 2008)
François Flahault
Le personnage principal de la pièce d’Ibsen, La Dame de la mer, présente des traits réalistes, mais aussi des traits qui la rapprochent des sirènes légendaires. En mêlant l’atmosphère du conte merveilleux au drame familial, Ibsen n’a pas fait preuve de maladresse ; il a trouvé, au contraire, le moyen de faire entendre les désirs contradictoires auxquels son héroïne est en proie. Comment se réaliser ? Dans le fini ou dans l’infini ? À l’intérieur de la société ou en dehors d’elle ? François Flahault évoquera les histoires de sirènes qu’Ibsen pouvait avoir présentes à l’esprit. Il montrera comment elles éclairent le choix final de la dame de la mer, choix surprenant tant il cadre mal avec la conception romantique et prométhéenne de l’individu qu’Ibsen avait paru revendiquer dans plusieurs de ses pièces antérieures.
Françoise Decant
La lecture de Françoise Decant nous amène à attacher nos pas au statut de l’indicible, en suivant les traces d’ Henrik Ibsen dans sa quête de cerner le réel, allant jusqu’à l’épingler du coté de l’impossible.
« En effet, en décrivant un sujet divisé, perpétuellement tiraillé entre Eros et Thanatos, l’œuvre d’Ibsen n’a pas peur d’accueillir en son sein l’Etranger, l’Hôte inconnu qui nous habite, car le braver, n’est-ce pas aussi lui faire une place, même si on ne peut le nommer? C’est sans doute parce qu’il était lui-même aux prises avec cet hôte inconnu, cet Etranger, que le poète Rainer Maria Rilke fut lui aussi un fervent lecteur d’Ibsen…
Dans ce très beau texte d’une saisissante sensualité, Ibsen va nouer le sexuel au réel de la mort, et ce nœud, c’est un marin qui va s’en faire le représentant. La mer, l’une des figures de la mère empruntée au symbolisme, est cet étrange objet de fascination mortifère…»
F. Decant, Février 2012